mercredi 1 décembre 2010

Oculus Oculi














Ce mur s'est affaissé vers 1920, puisqu'une carte postale de cette époque le montre encore avec deux fenêtres murées dans la partie supérieure.




Ces deux fenêtres murées ont sans doute été ouvertes en même temps que les quatre autres fenêtres qui se situent sur cette même façade.

Le "Logis des Hôtes" en 1740.

Ce bâtiment était sans doute destiné à recevoir les invités.

Il est presque certain que toute la longueur était aménagée en chambres puisqu'il y a encore deux fenêtres extérieures murées visibles vers 1920 sur la carte postale.

Le nombre de fenêtres sur la façade ouest peut déjà prouver qu'il y a eu six très grandes chambres, peut-être huit ? Des chambres aussi grandes que les quatre qui existent actuellement, c'est-à-dire, 7X6m.

Mais, ce bâtiment d’hospitalité n’a pas servi bien longtemps puisque la Révolution a mis en en vente l’ensemble du prieuré.

Tout a été démonté et vendu pierre par pierre, poutre par poutre par le fermier acquéreur qui ne garde qu’une moitié du Logis des hôtes pour habiter; il transforme l’autre partie en grange, grenier et écurie, c’est sans doute à cette époque qu’il mure les deux fenêtres de la façade Ouest sur la partie de droite.

Il aurait été plus judicieux que ce soit "l'église" qui ait été transformée en écurie.

Si "l'église" avait été transformée en écurie plutôt que "le logis des hôtes", cette église post-gothique serait toujours debout ! Mais, nous ne serions pas les propriétaires de cet ancien prieuré; il aurait eu tellement plus d'allure aujourd'hui, un plus fortuné que nous nous l’aurait soufflé sous le nez!

Meilleur scénario encore; si les paysans avaient eu la bonne idée de transformer l'ancien "bâtiment d'habitation" des moines en bergerie, en porcherie, en poulailler et en grenier à grain et à paille, tout l’ensemble du XVIIIème siècle sera encore debout aujourd’hui. Mais l’ensemble était trop grand pour l’échelle d’une exploitation de cette époque.

Malheureusement il ne reste que le Logis de Hôtes.



En 1971, date de notre achat, cette partie droite est toujours l'écurie de l'ancienne ferme surmontée d’un immense grenier à foin.

C'est seulement à partir de 1971 que nous commençons progressivement des gros travaux de restructuration dans ce monumental espace intérieur.

Aujourd’hui, nous préparons l’aménagement du futur appartement de Gilémon, 32 ans marié à Katherine, hongkongaise et leur fille de presque 4 ans, Maliciane.

En octobre 2010, nous venons d’ouvrir deux œil-de-bœuf.

Les plus gros travaux de consolidation entrepris et réalisés depuis 1971 dans "le Logis des Hôtes."

Rappel : le mur à droite du porche s’écroule en 1930 environ, il est reconstruit presque à l’identique, les pierres sont jointées.

1- En 1972 nous remontons le mur côté cour qui avait été remplacé par une palissade en bois après l'éboulement de 1945 environ.

Il était urgent de remplacer cette palissade de bois par un mur en pierre. La moitié du toit se serait écroulée si nous n'avions pas fait ce travail d'urgence en 1972, un travail de titan! Tout a été remonté en pierre de taille de récupération pris de la ferme d’à côté, celle des Fleurot. Ainsi, le toit charpenté formé de fermes est devenu beaucoup plus stable.

2- Malheureusement, cette façade de planches avait tiré le mur côté droit du porche, il était rentré de plus de 20 cm vers l'intérieur du grenier à foin. On peut voir cette courbe rentrée lorsque que l'on regarde depuis l'angle sud. Ce grand mur a failli s’écrouler de nouveau. En 1985 une partie de ce mur s'est écroulé vers l'intérieur du grenier à foin.

Cette histoire est racontée en détail dans un autre article de ce blog.

Aurions-nous eu le courage de remonter ce mur s’il s’était complètement effondré ?

3- Depuis 1971, progressivement, nous avons coulé des dalles pour séparer horizontalement les espaces de ce grand lieu vide. Ce sont ces planchers de béton plus que les murs de cloisons verticales qui tiennent l'ensemble des trois murs de la moitié Sud du "Logis des Hôtes".

Ces dalles intérieures en béton horizontales bien ancrées dans les parpaings de gris rose maintiennent la structure liée comme un seul bloc. On peut avoir confiance en notre structure comme en un maillage. C'est pour cela qu'il est possible maintenant d'envisager d'ouvrir des fenêtres sans faire tomber les lourdes pierres.

Il est maintenant possible d’enlever un certain nombre de parpaings de grès rose qui peuvent peser jusqu'à 100 kilos. Les enlever sans faire effondrer toute la façade et possible puisque les linteaux de béton des dalles des planchers tiennent les rangées de pierres roses.

4- Reconstruire des fenêtres identiques, était sans doute bien aussi ridicule que d'inventer d’autres formes de fenêtres.

Six fenêtres sont visibles sur une carte postale de 1920, quatre à gauche du porche, deux à droite, ces deux dernières sont murées.

Quelques détails et du "bon sens de moines" permettent d’affirmer que ces six fenêtres ont été ouvertes bien après la construction de cette façade de gris rose, qui était aveugle c’est pratiquement certain. Elle était aveugle pour protéger les chambres intérieures du vent et de la pluie battante donc de l’humidité. Les pierres parfaitement jointes sont et seront toujours une ramée efficace.

Les propriétaires qui ont ouvert ces six fenêtres dans les pierres roses, ont du le regretter, car la boiserie imputrescible et le double vitrage n'existaient pas. Il a sans doute fallu changer assez souvent les boiseries qui ne résistaient pas. D'ailleurs, des volets de protection ont été installés à la même époque. De plus, à l’intérieur, les fermiers ont construit un couloir, donc une cloison pour isoler les chambres du côté venté, une séparation qui est toujours efficace.

Il n'y avait pas de fenêtres à l'origine sur cette façade. Il était donc aujourd’hui impossible de respecter l'histoire. Nous avons longtemps réfléchi à la forme que l'on pouvait donner à ces fenêtres.


En septembre 2010, nous avons eu l'idée de mouler et de couler deux cercles de 1 m 20 avec un rebord de 8 centimètres.

Nous estimons que c'est une réussite!

Ce sont les petites fenêtres, dites pigeonniers de la partie supérieure qui nous ont donné l'envie de faire un rebord à nos oculus. Ces petites fenêtres sont dans l'esprit d'une fenêtre romane, une arcade à rebord.

Nous avons teinté le béton pour lui donner la couleur "gris rose légèrement violacée" des parpaings. Mais il faut éviter de trop teinter un béton qui pourrait perdre de sa solidité ; de plus, à trop le vibrer le ciment blanc et gris a tendance à revenir à la surface bien plus que la teinture.



On peut presque croire que ces deux oculi sont d’origine. Mais raisonnablement on ne peut pas imaginer que ces deux fenêtres aient pu être moulées au XVIIIe ! Toutefois nous sommes convaincus qu'elles sont bien intégrées dans la façade et qu'il est possible d'en ouvrir d'autres semblables ou différentes et notamment dans la façade sud, la plus authentique façade qui est restée proche de son origine.

Nous n'envisagions pas jusqu'à maintenant de pouvoir ouvrir des fenêtres dans cette façade sud.

Ce sera peut-être le prochain épisode.

Il faut encore y réfléchir, les fenêtres peuvent être autres que rondes.



A ceux qui crieraient :

"Deux fenêtres rondes dans cette façade aveugle c'est un scandale ! "

Nous répondons ; "Il n'y a jamais eu de fenêtre sur cette façade du logis des hôtes !"

(Peut-être même qu'il n'y avait pas le magnifique porche en grès blanc lorsque ce bâtiment a été construit en 1740 environ. Ce que j'avance n'est pas impossible lorsque l’on regarde les coups de sabre dans les rangées de pierres roses juste au-dessus du porche. Étaient-ils d'aussi mauvais maçons ? Ont-ils eu des remords ?)

L'extérieur de ce grand mur aveugle a été nettoyé des mousses et des lichens, la façade a retrouvé un aspect propre et net, toutefois les larges joints qui séparent chaque pierre n'ont pas été creusés comme nous aurions aimé le faire par la suite.

Encore que, nous avons découvert que les joints cachaient des éclats de pierres manquants, et nous ne nous en étions jamais aperçu avant de démonter ces grosses pierres pour l'ouverture des fenêtres.

C'est sans doute lorsque le mur s'est écroulé vers 1920 que beaucoup de pierres se sont ébréchées lors de leur chute les unes sur les autres. Nous pensons aussi que, c’est pour l’étanchéité que les maçons ont décidé de reboucher et de lisser les trous à la truelle.

Finalement, ces joints de ciment sont une bonne protection contre la pluie. La façade ainsi nettoyée est redevenue rose violacée, du coup, les joints de ciment gris nettoyées eux aussi paraissent moins grossiers qu’auparavant.

La façade à gauche du porche et la petite façade sud sont deux murs d'origine aux pierres non jointes par du ciment :

Les maçons taillaient tellement bien les pierres qu'elles se joignaient parfaitement!



Malencontreusement le propriétaire a ouvert six fenêtres, et les maçons de cette époque ont maltraité certaines pierres de grès rose, c’est très visible et ils y ont intégré des montants de grès blanc qui proviennent d'ailleurs, mais d'où ? Ce sont sans doute des pierres de récupération, comme ça se faisait beaucoup à cette époque.

Il semblerait donc que les maçons de cette époque n’aient pas été aussi bons qu'on le dit !

1- Lorsqu'on regarde la façade d’origine, on remarque que les rangées de pierres roses sont toutes bien horizontales et de même épaisseur, en revanche lorsque l'on suit les lignes verticales, on remarque des lignes verticales assez longues, des séparations de pierres non décalées, il y en a beaucoup, elles ne devraient pas exister. Il devrait toujours y avoir des décalages entre les pierres de rangées inférieures et supérieures, même un débutant le sait. Ces lignes verticales sont appelées des coups de sabre, il y en a beaucoup dans cette façade.

2- Il est indispensable de croiser les pierres dans l'épaisseur des murs, ils ne l’ont pas fait ! Les quatre murs de 50 centimètres d’épaisseur sont montés par deux rangées de moellons, une rangée de pierres quelconque côté intérieur et le grès rose côté extérieur. Ces deux murs contigus ne sont pas croisés, Ils ont été montés comme deux murs séparés, maintenu par le milieu uniquement par du sable et de la chaux, jamais les pierres ne sont croisées dans leur largeur !

C’est vraiment un point faible, un des deux murs pouvait toujours s’effondrer. Mais, ça n’est plus d’actualité puisque le béton des dalles lie maintenant l’ensemble à intervalles réguliers.