Vieux MursMurs.
Un vieux mur en ruine de 500 mètres longe un chemin qui mène au fond d’un ancien pré appartenant au Prieuré d’Hérival.
Les pierres de ce mur ont toutes été chamboulées par le temps, les racines, l’eau…
Le chemin ne mène plus au fond d’un pré depuis longtemps, il conduit à la forêt, il est rarement utilisé.
De ce chemin, donc à quelques centaines de mètres, quand on se retourne, on voit bien le « Bâtiment des Hôtes », l’unique bâtiment, les autres parties du Prieuré ont été démolies après la Révolution.
Pour le plaisir, mais aussi pour rien, et aussi en pensant à mon père qui était maçon, je reconstruis ce mur.
Je l’ai redressé sur une vingtaine de mètres.
Il reste plus de quatre cents mètre de serpent de mer à raccommoder…
Mon père aimait "le pinard", comme il aimait à le nommer. En 1945, le mot vin est présent dans presque toutes les lettres qu'il envoya à son tuteur (mon père était orphelin).
À la Libération, il devint maçon.
En 1955, (j'avais sept ans) il tomba d'un échafaudage et se brisa le crâne, l'os du rocher était en éclats. Il avait sans doute bu quand cela lui arriva? (Mais je ne suis sûr de rien.) Ses camarades, par solidarité, témoignèrent que non. Il se remit très mal de cet accident et fut déclaré invalide civil quelques années plus tard, après bien des démêlés avec la Sécurité Sociale qui régulièrement voulait le voir retravailler.
Mon père se sentait diminué : j'ai souvenir de cela.
Les médecins lui avaient interdit le vin et le tabac. Il ne put accepter ce sacrifice. L'alcool le mina progressivement. Après son accident il lui fallait très peu d'alcool pour être complètement saoul : il n'était plus à la même enseigne que les autres buveurs, les années comptèrent triple pour sa constitution physique.
Malgré les circonstances atténuantes dues à son accident du travail, mon père me faisait honte, il me gâchait mon plaisir quand je revenais en permission de fait, je préférais retourner dans ma caserne.